Des poussières de Baudelaire...

Publié le par Bélisaire

Je mets un point d'honneur à ne pas faire de ce blog un sanctuaire du copier-coller comme on en voit tant mais puisqu'il est un lieu où je me livre, qui doit me ressembler, pourquoi ne pas y partager ce que j'ai aimé ? Pour ce faire la citation partielle ou complète est parfois un passage obligé - même s'il me tient à coeur que les mots déposés ici soient avant tout les miens - et pourquoi vouloir décrire si mal ce que d'autre on si bien écrit ? Assez de justification... Place à un poème de Baudelaire tiré des Fleurs du mal mais que j'ai tout d'abord découvert dans une Anthologie de la poésie française que l'on doit à Georges Pompidou.


J'ai plus de souvenirs que si j'avais mille ans.


Un gros meuble à tiroirs encombré de bilans,
De vers, de billets doux, de procès, de romances,
Avec de lourds cheveux roulés dans des quittances,
Cache moins de secrets que mon triste cerveau.
C'est une pyramide, un immense caveau,
Qui contient plus de morts que la fosse commune.
- Je suis un cimetière abhorré de la lune,
Où comme des remords se traînent de longs vers
Qui s'acharnent toujours sur mes morts les plus chers.
Je suis un vieux boudoir plein de roses fanées,
Où gît tout un fouillis de modes surannées,
Où les pastels plaintifs et les pâles Boucher,
Seuls, respirent l'odeur d'un flacon débouché.



Rien n'égale en longueur les boiteuses journées,
Quand sous les lourds flocons des neigeuses années
L'ennui, fruit de la morne incuriosité,
Prend les proportions de l'immortalité.
- Désormais tu n'es plus, ô matière vivante !
Qu'un granit entouré d'une vague épouvante,
Assoupi dans le fond d'un Saharah brumeux ;
Un vieux sphinx ignoré du monde insoucieux,
Oublié sur la carte, et dont l'humeur farouche
Ne chante qu'aux rayons du soleil qui se couche.


Que dire sur l'impression que m'a fait ce poème ? Tour à tour puissant, troublant, ou terriblement désuet il ressemble tellement à ce qu'il dit... Suranné. Sans doute la tristesse tranquille qui émane de ces vers correspondait terriblement bien à mon état d'esprit lorsque je les ai découvert. Une description à la Balzac, saupoudrée de poussière, on imagine bien... Mais voilà ces vers qui s'acharnent, ces morts. Des vers, de gros vers blancs dans un tableau de Boucher, quelle idée ! De quelques mots on voyage en images et en émotions... J'aime, je suis frustré... Pourtant, surtout, j'aime !

Publié dans Leurs mots

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